Le vrai courage : ne pas forcément “faire comme tout le monde”…

Dans mon livre “Cette révolte qui ne viendra pas“, j’explique que le syndrome de la “pensée unique” est si fort et tant répandu.

Tout simplement parce qu’il est dans la nature humaine de se “mettre en conformité” avec le groupe… Sceptique ?

Vous ne devriez pas pourtant… Abraham Maslow l’a bien compris en mettant le “besoin d’appartenance” dans sa hiérarchie des besoins humains (voir à http://fr.wikipedia.org/wiki/Pyramide_des_besoins_de_Maslow). Mais ce que Maslow ne soupçonnait pas, c’est que la satisfaction de ce besoin (le besoin d’appartenance ou d’intégration) pousse l’individu à tricher pour s’aligner sur “la pensée unique”… Et c’est ce que “l’expérience de Asch” a démontré !

La fameuse “pyramide des besoins fondamentaux” dérivée des travaux de Maslow (lui-même n’a jamais évoqué la notion de pyramide, simplement de hiérarchie…). Source : Wikipedia.

L’expérience de “Asch”

Imaginée par Solomon Asch, voir à http://fr.wikipedia.org/wiki/Solomon_Asch) :

Solomon Asch invita un groupe d’étudiants de 17 à 25 ans à participer à un prétendu test de vision. Tous les participants étaient complices avec l’expérimentateur, sauf un. L’expérience avait pour objet d’observer comment cet étudiant (le sujet) allait réagir au comportement des autres.

Les complices et le sujet furent assis dans une pièce et on leur demanda de juger la longueur de plusieurs lignes tracées sur une série d’affiches. À gauche, une ligne modèle, et à droite, 3 autres lignes. Chacun devait dire laquelle de ces 3 lignes sur la droite était égale à la ligne modèle de gauche. Au début, les complices ont donné à l’unanimité la même fausse réponse avant de laisser le sujet répondre en dernier.

Exemple : la ligne de gauche est la ligne de référence ; les trois lignes de droite sont les lignes de comparaison.

Tandis que la plupart des sujets répondirent correctement, beaucoup furent assez perturbés, et un grand nombre (37 %) finissait par se conformer aux mauvaises réponses soutenues à l’unanimité par les complices. Les sujets étaient même amenés à soutenir des réponses allant contre l’évidence et leur propre vue, pour par exemple affirmer que deux lignes avaient la même longueur, alors que l’écart était très visible car de plus de 5 cm.

Lorsqu’il n’y avait pas unanimité parmi les complices, les sujets s’émancipaient du groupe pour soutenir la réponse vraie, mais dissidente et contrariante pour le groupe.

Des sujets témoins, qui n’étaient pas soumis à un point de vue majoritaire, n’eurent aucun mal à donner toujours la bonne réponse.

Après l’annonce des résultats, le sujet attribuait généralement sa piètre performance à sa propre « mauvaise vue ». Ceci rejoint dans une certaine mesure l’expérience de Milgram où le sujet accuse l’expérimentateur d’être responsable de son comportement. Dans les deux cas, le sujet se dédouane de la responsabilité de ses décisions sur un élément extérieur à sa volonté.

https://youtu.be/XvAS2uektEA

L’expérience de Milgram

Enchaînons avec la bien connue “expérience de Milgram” qui démontre la soumission naturelle à l’autorité (voir à http://fr.wikipedia.org/wiki/Exp % C3 % A9rience_de_Milgram) :

Le test de Milgram se base sur le concept de la dilution de responsabilité. Plus il y a de personnes impliquées, moins on a l’impression d’être responsable (« Je ne fais que suivre les ordres et appuyer sur le bouton »), on évite ainsi les conflits de conscience quand on est dans la situation de devoir faire quelque chose de moche. Dans le test de Milgram, lorsque le sujet ne presse plus le bouton mais ordonne à quelqu’un d’autre de le presser, le taux de soumission augmente encore plus (« je ne fais que transmettre l’ordre »).

L’expérimentateur (E) amène le sujet (S) à infliger des chocs électriques à un autre participant, l’apprenant (A), qui est en fait un acteur. La majorité des participants continuent à infliger les chocs jusqu’au maximum prévu (450 V) en dépit des plaintes de l’acteur. Source : Wikipedia.

L’expérience de Milgram est une expérience de psychologie réalisée entre 1960 et 1963 par le psychologue américain Stanley Milgram. Cette expérience cherchait à évaluer le degré d’obéissance d’un individu devant une autorité qu’il juge légitime et à analyser le processus de soumission à l’autorité, notamment quand elle induit des actions qui posent des problèmes de conscience au sujet.

L’objectif réel de l’expérience est de mesurer le niveau d’obéissance à un ordre même contraire à la morale de celui qui l’exécute. Des sujets acceptent de participer, sous l’autorité d’une personne supposée compétente, à une expérience d’apprentissage où il leur sera demandé d’appliquer des traitements cruels (décharges électriques) à des tiers sans autre raison que de « vérifier les capacités d’apprentissage ».

La majorité des variantes de l’expérience a eu lieu dans les locaux de l’université Yale. Les participants étaient des hommes de 20 à 50 ans de tous milieux et de différents niveaux d’éducation. Les variantes impliquent le plus souvent trois personnages : l’élève, qui devra s’efforcer de mémoriser des listes de mots et recevra une décharge électrique, de plus en plus forte, en cas d’erreur ; l’enseignant, qui dicte les mots à l’élève et vérifie les réponses. En cas d’erreur, il enverra une décharge électrique destinée à faire souffrir l’élève ; l’expérimentateur, représentant officiel de l’autorité, vêtu de la blouse grise du technicien, de maintien ferme et sûr de lui.

L’expérimentateur et l’élève sont en réalité des comédiens et les chocs électriques sont fictifs.

Dans le cadre de l’expérience simulée (apprentissage par la punition), élève et enseignant sont tous deux désignés comme “sujets”. Dans le cadre de l’expérience réelle (niveau d’obéissance, soumission à l’autorité), seul l’enseignant sera désigné comme sujet.

Au début de l’expérience simulée, le futur enseignant est présenté à l’expérimentateur et au futur élève. Il lui décrit les conditions de l’expérience, il est informé qu’après tirage au sort il sera l’élève ou l’enseignant, puis il est soumis à un léger choc électrique (réel celui-là) de 45 volts pour lui montrer un échantillon de ce qu’il va infliger à son élève et pour renforcer sa confiance sur la véracité de l’expérience. Une fois qu’il a accepté le protocole, un tirage au sort truqué est effectué, qui le désigne systématiquement comme enseignant.

L’élève est ensuite placé dans une pièce distincte, séparée par une fine cloison, et attaché sur une chaise électrique. Le sujet cherche à lui faire mémoriser des listes de mots et l’interroge sur celles-ci. Il est installé devant un pupitre où une rangée de manettes est censée envoyer des décharges électriques à l’apprenant. En cas d’erreur, le sujet enclenche une nouvelle manette et croit qu’ainsi l’apprenant reçoit un choc électrique de puissance croissante (15 volts supplémentaires à chaque décharge). Le sujet est prié d’annoncer la tension correspondante avant de l’appliquer.

Les réactions aux chocs sont simulées par l’apprenant. Sa souffrance apparente évolue au cours de la séance : à partir de 75 V il gémit, à 120 V il se plaint à l’expérimentateur qu’il souffre, à 135 V il hurle, à 150 V il supplie d’être libéré, à 270 V il lance un cri violent, à 300 V il annonce qu’il ne répondra plus. Lorsque l’apprenant ne répond plus, l’expérimentateur indique qu’une absence de réponse est considérée comme une erreur. Au stade de 150 volts, la majorité des sujets manifestent des doutes et interrogent l’expérimentateur qui est à leur côté. Celui-ci est chargé de les rassurer en leur affirmant qu’ils ne seront pas tenus pour responsables des conséquences. Si un sujet hésite, l’expérimentateur lui demande d’agir. Si un sujet exprime le désir d’arrêter l’expérience, l’expérimentateur lui adresse, dans l’ordre, ces réponses :

• « Veuillez continuer s’il vous plaît. »

• « L’expérience exige que vous continuiez. »

• « Il est absolument indispensable que vous continuiez. »

• « Vous n’avez pas le choix, vous devez continuer. »

Si le sujet souhaite toujours s’arrêter après ces quatre interventions, l’expérience est interrompue. Sinon, elle prend fin quand le sujet a administré trois décharges maximales (450 volts) à l’aide des manettes intitulées XXX situées après celles faisant mention de “Attention, choc dangereux”.

Lors des premières expériences menées par Stanley Milgram, 62,5 % (25 sur 40) des sujets menèrent l’expérience à terme en infligeant à trois reprises les électrochocs de 450 volts. Tous les participants acceptèrent le principe annoncé et, éventuellement après encouragement, atteignirent les 135 volts. La moyenne des chocs maximaux (niveaux auxquels s’arrêtèrent les sujets) fut de 360 volts. Toutefois, chaque participant s’était à un moment ou à un autre interrompu pour questionner le professeur. Beaucoup présentaient des signes patents de nervosité extrême et de réticence lors des derniers stades (protestations verbales, rires nerveux, etc.).

Milgram a qualifié à l’époque ces résultats “d’inattendus et inquiétants”. Des enquêtes préalables menées auprès de 39 médecins psychiatres avaient établi une prévision d’un taux de sujets envoyant 450 volts de l’ordre de 1 pour 1000 avec une tendance maximale avoisinant les 150 volts.

En plus des nombreuses variantes expérimentales qui permettent de mettre en valeur des facteurs de la soumission, Stanley Milgram propose dans son livre paru en 1974 une analyse détaillée du phénomène. Il se place dans un cadre évolutionniste et conjecture que l’obéissance est un comportement inhérent à la vie en société et que l’intégration d’un individu dans une hiérarchie implique que son propre fonctionnement en soit modifié : l’être humain passe alors du mode autonome au mode systématique où il devient l’agent de l’autorité.

Conformisme et pulsion d’intégration

On vient de le voir par l’expérience de Asch, le conformisme est un comportement très répandu. Mais on est en droit de se poser la question : pourquoi les gens sont-ils conformistes ?

Pourquoi font-ils tous plus ou moins la même chose, s’habillent-ils de la même façon, habitent-ils dans les mêmes conditions et ainsi de suite ?

Non pas parce que l’offre est uniforme ou parce qu’on “ne pourrait faire autrement”… Mais bien par instinct !

La terrible vérité sur le conformisme c’est qu’elle est simplement un sous-produit de la pulsion d’intégration… Eh oui.

Pour comprendre notre société moderne et le comportement désolant de l’immense majorité de nos contemporains, il est indispensable de connaître les ressorts de la pulsion d’intégration. Je vais vous l’expliquer hic et nunc (ici et maintenant) :

L’homme est un animal social par nécessité car c’est ainsi qu’il est plus performant. Tout seul, il ne fait pas grand-chose de grandiose : il se retrouve vite vêtu de peaux de bêtes dans une caverne sombre et puis c’est tout… Essayez donc d’assumer le mode de vie autarcique qu’implique le vrai individualisme : vous n’allez pas résister longtemps face à la difficulté de l’exercice !

Alors qu’en groupe, les individus peuvent se répartir les multiples tâches par goût ou par compétence. C’est ainsi que, progressivement, les individus naturellement polyvalents mais médiocrement performants deviennent moins polyvalents mais plus performants… Ils se sont spé-cia-li-sés. Et c’est comme cela qu’on passe en quelques millénaires des cavernes sombres aux concentrations urbaines.

Donc, c’est pour pouvoir se spécialiser et ainsi augmenter son niveau de performance que l’individu rejoint le groupe mais ça ne lui plaît pas. Nécessité fait loi, certes mais pas dans la joie…

Car l’homme est fondamentalement un individualiste. En cela, il ressemble plus à un loup qu’à une abeille ou une fourmi (qui elles sont de vrais animaux sociaux). Notre loup est capable de vivre en meute mais alors il le fait en vivant dans le stress. Car soit il est le loup dominant (le chef de la meute) et risque d’être renversé à tout moment par un plus jeune et un plus fort. Soit il fait partie des dominés et doit obéir au mâle dominant et ce n’est pas toujours une partie de plaisir. Quand le chef de meute est chassé par un plus fort ou plus jeune, il devient alors un vieux solitaire qui tente de s’en sortir par ses propres moyens… Mais revenons à nos humains !

L’individu [normal] n’aime pas se fondre dans la masse car il se sent alors en compétition avec ses semblables (compétition pour tout : nourriture, espace, etc.). Cette contradiction fondamentale entre sa pulsion individualiste et son adhésion à la vie en société n’est pas sans générer un stress permanent qui peut tourner à la névrose pour certains. Et la culture ainsi que la propagande sont là pour nous conforter dans notre choix en nous serinant qu’il n’y a pas d’alternative… Mais alors, si on n’aime pas cela, pourquoi le fait-on quand même ?

Ou, plus exactement, comment se fait-il qu’on arrive à surmonter notre individualisme primaire ?

Oui, c’est là la bonne question ; on passe au-delà de notre instinct de compétition parce qu’il y a un instinct plus fort qui nous y pousse : l’instinct grégaire. Et la pulsion d’intégration est le moteur le plus spectaculaire de cet instinct grégaire.

Ce n’est pas par plaisir que les ados font tant d’efforts pour ressembler aux adultes : ils ne peuvent pas faire autrement que d’obéir à leur instinct qui leur commande de faire les mêmes erreurs, les mêmes choix, les mêmes comportements. La pulsion d’intégration se manifeste tout le temps et partout : c’est ainsi que les femmes portent leurs lunettes dans leurs cheveux. C’est aussi à cause de cette pulsion que tant de gens fument sans même savoir pourquoi et ainsi de suite.

La pulsion d’intégration est un tyran omniprésent qui ne vous laisse aucun répit : il faut que l’individu-candidat-à-rentrer-dans-un-groupe ressemble aux autres par tous les moyens. Pourquoi croyez-vous que les soldats portent un uniforme ?

C’est seulement quand l’individu est admis dans un groupe qu’il peut alors ressentir sa propre existence dans les yeux des autres. Il a alors passé le seuil, la pulsion d’intégration le laisse enfin souffler, il vient de gravir un degré de plus dans la pyramide de Maslow, il peut enfin passer à autre chose.

La civilisation a toujours organisé ce processus d’intégration de plus en plus en profondeur : de l’école maternelle à la maison de retraite en passant par l’armée, les syndicats, l’église, etc.

La pulsion d’intégration est de plus en plus le mécanisme à prendre en compte pour comprendre les évolutions de la société. Alors qu’on croit que l’individualisme est au sommet, la réalité est que la demande d’intégration n’a jamais été aussi forte, surtout chez les jeunes.

Du coup, la rage de se distinguer qu’on croit discerner chez nos ados ne vient qu’en second une fois sa place trouvée dans le groupe (quel que soit le groupe, l’important est de trouver un groupe où l’on soit accepté et une fois cela acquis, on constate une obéissance aveugle aux règles du groupe, même si elles sont absurdes ou cruelles, comme l’illustre le très bon film “La vague”).

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