Le numérique, voie royale de l’autoédition

Dans mon dernier livre, “Publier sur iPad & Kindle“, j’ai inclus un chapitre sur l’autoédition… Voici le texte de ce chapitre (sans les illustrations) :

Le numérique, voie royale de l’autoédition

Bien entendu, tout ce que je vous décris dans cet ouvrage, c’est normalement à votre éditeur de le faire… À ce niveau, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle.

Commençons par la mauvaise : soyons clair, il est de plus en plus difficile de trouver un éditeur, point.

Et la bonne maintenant : rassurez-vous, l’autoédition n’a jamais été aussi facile et profitable !

Je vais revenir sur la “pénurie” des éditeurs, expliquer pourquoi il est de plus en plus difficile de faire publier son livre par ces intermédiaires et les raisons de cet état de fait. Mais, d’abord, voyons quel était le rôle des éditeurs dans ce que j’appellerais “l’ancienne situation”…

Ce que faisaient les éditeurs

Dans le couple auteur/éditeur, les rôles sont plus ou moins équilibrés : c’est l’auteur qui produit le contenu et c’est l’éditeur qui rend ce contenu publiable afin de le distribuer ensuite le plus largement possible. Le travail de l’éditeur comporte donc trois phases : 1- finaliser l’ouvrage (une fois qu’il a accepté le tapuscrit de l’auteur), 2- le fabriquer, 3- le promouvoir et le diffuser.

Rendre le contenu publiable, cela signifie déjà pas mal d’étapes : relectures, corrections, mise en page, réalisation de la couverture pour ne citer que les plus évidentes. C’est un gros travail qui fait appel à des intervenants spécialisés. C’est quelquefois long et toujours coûteux mais ce n’est rien par rapport aux deux dernières phases : fabriquer et diffuser l’ouvrage.

Fabriquer un livre qu’on vient de finaliser n’est pas si simple : il faut donner les éléments nécessaires à l’imprimeur, c’est-à-dire connaître les contraintes techniques propres à ce secteur. Éventuellement, il faudra aussi suivre le travail du relieur si celui-ci est différent de l’imprimeur.

Une fois fabriqué (en n milliers d’exemplaires, rarement moins d’un millier), on peut passer à sa diffusion…

Il faut d’abord assurer sa promotion : publicité (coûteuse), distribution gratuite aux journalistes et critiques sont à la base de cet exercice. Sans promotion, votre ouvrage a peu de chances d’être remarqué par sa cible naturelle. Enfin, il faut distribuer le livre dans le réseau des libraires et des revendeurs (grandes surfaces par exemple) et, pour cela, les petits éditeurs passent un accord avec un distributeur, un autre intermédiaire spécialisé de cette “chaîne de l’édition”…

Les contrats d’édition : beaucoup de contraintes, peu de profits

Les contrats qui unissent les auteurs et les éditeurs sont souvent ressentis comme léonins par les premiers… Les auteurs ont l’impression de ne recueillir que les miettes de leur travail. En effet, même pour les écrivains vedettes, les droits d’auteur dépassent rarement 10 % du prix de vente public du livre objet du contrat.

De plus, l’auteur est lié à l’éditeur pour ses ouvrages suivants (une clause plus ou moins théorique mais bien présente) et perd son pouvoir de décision sur son œuvre (ce n’est pas lui qui choisit par qui l’ouvrage sera traduit le cas échéant et ainsi de suite). Je ne vais pas entrer dans les détails de ce type de contrat mais il suffit de dire qu’il est assez mal vécu par la partie “auteur”…

Crise sur le marché de l’édition

En vérité, les auteurs ne peuvent pas se plaindre car ce sont les éditeurs qui assument les risques financiers liés à la publication d’un livre alors que l’auteur lui ne risque que sa réputation. Et les risques financiers liés à la publication d’un livre papier sont bien réels, ils peuvent même être assez lourds… En fait, c’est l’éditeur qui doit investir beaucoup en amont pour espérer un retour plus ou moins hypothétique en aval. C’est l’éditeur qui paye la finalisation de l’ouvrage (rappel : relecture, corrections, couverture…), c’est l’éditeur qui paye l’imprimeur et le relieur (et quand on imprime des milliers d’exemplaires, la facture se monte en milliers d’euros) et enfin, c’est l’éditeur qui avance les livres aux libraires, ceux-ci ne payant que les exemplaires effectivement vendus, le distributeur se chargeant de renvoyer le surplus (les invendus) à l’éditeur, à ses frais bien entendu !

Si, après ça, vous voulez toujours vous lancer dans le monde de l’édition, bon courage…

Certes, quand on a la chance (ou plutôt quand on bien fait son travail de promotion oui !) d’avoir un ouvrage qui se vend bien, l’édition peut-être une activité très rentable mais avant cela, que de risques !

Étonnez-vous avec cela que les éditeurs puissent être frileux avec les nouveaux auteurs… D’autant que, lors de ces dix dernières années, le contexte du marché de l’édition a radicalement changé : le nombre de lecteurs (ou, au moins, d’acheteurs de livres) a baissé et l’offre de son côté a explosé… En effet, le nombre de nouveaux livres mis sur le marché lors des grands rendez-vous périodiques a considérablement augmenté.

Et, si ça ne suffisait pas, une concurrence déloyale commence à apparaître : certains éditeurs des pays de l’est n’hésitent pas à reproduire intégralement certains ouvrages pour les vendre sur les circuits habituels (c’est de la contrefaçon, comme pour des produits de luxe mais les libraires n’ont pas les moyens de s’en apercevoir).

C’est un éditeur Belge spécialisé dans les ouvrages sur le sport automobile qui m’a expliqué en détail cette évolution lors qu’en 2008, je cherchais un éditeur pour la biographie du pilote Soheil Ayari que j’étais en train d’écrire (finalement, cette biographie a été autoéditée grâce aux efforts de Sassan, le frère de Soheil, qui s’occupe aussi de sa diffusion).

Avec tout cela, le marché de l’édition est en crise. Il est donc de plus en plus difficile pour un nouvel auteur de percer avec son premier ouvrage. On dit souvent que tout est affaire de relations vis-à-vis de ce délicat problème et je pense que c’est au moins en partie vrai : j’en ai vécu un exemple concret avec mon livre SimRacing publié chez Pearson en 2009. Pendant presque un an, j’avais tenté de prendre contact avec cet éditeur pour lui proposer ce projet mais sans succès : on ne répondait même pas à mes courriers ou emails. Et puis, j’ai pu évoquer ce projet avec une relation connaissant bien le directeur général de Pearson France… Aussitôt, le directeur des publications prit contact avec moi et une semaine après je recevais le contrat !

L’autoédition aux temps héroïques

Pour contourner cette barrière, les auteurs indépendants ont recours à l’autoédition. Comme toujours, c’est une pratique qui existe depuis longtemps mais, auparavant, on appelait souvent cela “édition à compte d’auteur” (encore que, cette notion n’est pas tout à fait comparable avec l’autoédition telle que je l’évoque ici mais passons) et c’était plutôt mal vu. En gros, celui qui avait recours à l’édition à compte d’auteur n’était simplement pas assez talentueux pour mériter les services d’un “vrai” éditeur et il devait payer pour permettre à son ouvrage de voir le jour (mais pas forcément de rejoindre les vitrines des libraires, nuance !). Les Anglo-Saxons ont même une appellation péjorative “vanity publishing” pour désigner cette pratique considérée comme désespérée par les professionnels du secteur…

Le principal problème de l’autoédition à l’ancienne manière, c’est qu’il fallait soi-même passer par les services d’un imprimeur (une fois votre ouvrage finalisé et prêt à être imprimé et à condition d’avoir assimilé toutes les contraintes techniques liées à cet exercice… Rien d’insurmontable quand on a le temps et la volonté de se plonger là-dedans !) et que ce dernier n’acceptait votre travail qu’à condition de commander au moins un millier (voir deux) d’exemplaires de votre livre. En effet, l’imprimerie traditionnelle (offset) demande la réalisation de “plaques” d’impression et le calage de celles-ci… Et cette procédure n’était pas rentable pour des petits volumes (en dessous du millier d’exemplaires). Du coup, vous étiez obligé d’avancer une somme considérable (mettons que votre livre fasse 200 pages et que son coût d’impression s’établisse à cinq euros, il vous fallait faire un chèque de 5000 euros…) pour repartir avec de nombreux cartons contenant vos livres. Libre à vous ensuite de trouver comment diffuser ce volume !

Nous avons connu cette expérience puisque les deux livres rédigés par ma femme ont d’abord été édités ainsi avant de connaître une version numérique. Le premier, La pédagogie Montessori Illustrée, a d’abord connu trois éditions papier avant d’être disponible pour l’iPad (voir à http://blog.montessori.fr/nos-livres/). Le second, 365 jours d’école à la maison, continue à bien se vendre à travers son site dédié (voir à www.ecolealamaison.org) mais c’est nous qui assurons tout le travail (promotion, expédition, etc.)…

L’autoédition remis au goût du jour par l’impression à la demande

Ce qui a relancé l’autoédition, c’est la montée de “l’impression à la demande”. Grâce aux progrès de la chaîne de production numérique et à de nouveaux matériels, les imprimeurs ont pu réduire drastiquement les coûts d’impression unitaire jusqu’au point où il est rentable d’imprimer un seul exemplaire d’un livre !

Des sites spécialisés comme Lulu.com se sont emparés de cette possibilité pour offrir un service intégré d’autoédition à tous les auteurs capable de télécharger un tapuscrit finalisé sur Internet. J’utilise TheBookEdition.com (un service français comme son nom ne l’indique pas !) pour diffuser la version papier de certains de mes livres et c’est une bonne solution car vous n’avez plus rien à faire (si ce n’est la promotion, encore et toujours !) une fois votre ouvrage en ligne et prêt à être vendu et expédié.

Cependant, on est toujours face à un livre papier qui reste coûteux à imprimer et lourd à expédier par La Poste (et ces frais d’envoi s’ajoutent au prix du livre). Ci fait qu’on se retrouve avec une offre relativement peu compétitive face à celle des gros éditeurs ou alors, on minimise sa marge pour proposer un livre à un prix abordable (lors du processus de publication sur le site d’impression à la demande, c’est vous qui fixez la marge que vous souhaitez toucher sur chaque vente, celle-ci va s’ajouter au coût d’impression pour établir le prix de vente final et public).

Le numérique simplifie tout !

C’est ici que le numérique entre en scène et vient apporter sa touche finale à l’apogée de l’autoédition !

Avec le numérique, terminé les contraintes du papier : mise en page, coût d’impression et coût d’expédition… Reste un produit plus facile à finaliser, plus souple, moins cher et plus rentable… À condition d’arriver à le diffuser !

Reste la question de la distribution et de la promotion

Car, bien sûr, la promotion et la distribution restent plus que jamais les facteurs clés dans le succès d’un nouveau livre. Avec le numérique, vous avez les outils nécessaires et suffisant pour remplacer avantageusement votre éditeur au niveau de la finalisation et de la fabrication/publication de votre ouvrage mais il faut encore se consacrer à la troisième phase : assurer la distribution la plus large et la promotion la plus visible… Et là, rien ne remplace vos propres efforts.

Pour la distribution, j’en ai parlé dans le chapitre 13 de ce livre, il faut passer par un intermédiaire spécialisé comme Immatériel et cela en vaut la peine (ne serait-ce que pour simplifier la publication sur Itunes pour l’iPad…). Pour la promotion, il vous faut, au minimum, tenir un blog ou une page sur Facebook où vous allez promouvoir votre ouvrage en mettant en avant son actualité.

Ici, on sort du cadre de ce livre, il existe bien des ouvrages sur la question et je ne peux que vous souhaitez bon courage et de prendre exemple sur ce que j’ai fait pour mon ouvrage sur l’histoire de l’informatique : site dédié à www.histoireinformatique.com, page Facebook à http://www.facebook.com/pages/Histoire-de-linformatique/145612858819024 et compte twitter à http://twitter.com/#!/histoireit.

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